Les vers du Solitaire

d4 Messages : 7 Date d'inscription : 19/07/2012

Voilà pour toi pauvre homme, et puisse cela t´aider
A boire, te sustenter, ce n´est qu´une modique somme
Je te confie aussi ce parchemin moisi
Qui, si tu le lis, changera peut être ta vie.

Elle remit au mendiant une poignée de pièces d´or, ainsi qu´un bout de papier chiffonné et abimé sur lequel est décrit avec force détail l´itinéraire exact menant au trésor qu´elle avait dérobé aux pirates il y a de cela deux jours. De quoi acheter un royaume, et peut être un bout d´empire. Certes, c´était écrit en draconnien, et elle avait, comme toujours, parlé dans sa langue natale mais bon, il fallait bien mettre un peu de piment dans la chose non ?

Je me demande, s´il le trouve, ce qu´il en fera
Se proclamera t´il roi ? Aura t´il sa bande ?
Se gavera t´il d´amandes, ou est ce qu´il prendra
Les armes contre les malfrats et les troupes brigandes ?

Tinuvielle n´était pas là depuis très longtemps, mais déjà elle aimait cette grande ville de Lorcust. On y trouvait de tout, des voyageurs affamés, des exilés comme elle, des marchands rusés et des gardes désabusés. Ici, il fallait vraiment être demeuré pour ne pas trouver quelque chose à faire, la ville vibrait le jour et explosait la nuit. Les cabarets étaient ses endroits favoris, tout en couleurs, chants et autres spectacles, aux personnages fantasques et souvent dangereux qui lui rappelaient de temps en temps certains de ses compagnons. Et puis là bas on ne la dévisageait pas sans arrêt sur son apparence et son masque, non que cela ne la gêne. Et puis elle arrivait même à en trouver qui parlaient l´elfique, et elle pouvait ainsi avoir des nouvelles des contrées des siens. Les elfes l´évitaient toutefois, et seuls ceux nés dans les villes acceptaient de lui parler, ignorants des Arlequins et du rôle qui était le sien.

Enfin, il n´y avait qu´en ces lieux qu´elle pouvait enfin faire ce autour de quoi sa vie tournait : raconter, déclamer odes, épopées et tragédies de temps anciens et oubliés et dont bien peu de personnes se souvenaient. Elle se refusait d´intégrer tout groupe d´acteur, ses anciens frères de scène étaient irremplaçables, aussi continuait elle à être seule. Ses longues nuits donnaient naissance à des journées fades en comparaison, et elle aimait trouver le calme et la sérénité dans quelques jeux d´épée ou en lectures acharnées dans la grande bibliothèque de la cité. Sa nature elfique la rendait infatigable, aussi ne dormait elle que très rarement.

Une vie décousue pour un être détruit
Fêtarde nocturne je suis, puis élève assidue
Chanter, danser, déclamer, voilà toute ma vie
Loin de ma compagnie, il ne m´ont rien laissé
Hormis pour m´éclairer, un peu de poésie.

Admin Messages : 35 Date d'inscription : 05/10/2011

La nuit tomba sur la cité de Lorcust. Le ciel se teintait de couleurs intenses, rendant notre jeune héroïne souriante. Cette nuit s'annonçait bien, une nuit de chants de danses et de rencontres!
L'elfette jeta son dévolu sur une taverne appelé "La chope étoilée". Cette taverne était excentré par rapport au centre mercantile de la cité mais était placé sur un des grands axes qui traversaient la ville, entre le quartier commerçant et le quartier noble. La clientèle était toujours bien vêtue, le tavernier n'avait que peu de problèmes d'ardoise. Toutefois les services proposés étaient assez onéreux.
Tinuvielle appréciait beaucoup cet endroit, c'était le lieu de rencontre de puissants chevaliers et les histoires racontées la bas étaient toujours épiques (et cela la changeait beaucoup!)
Des notes de musiques s'échappaient par les fenêtres lambrissées du bâtiment. Trapue, au regard des bâtiments pompeux présents de chaque côté de l'avenue, la taverne bénéficiait d'un charme pittoresque: toit en chaume, poutres en chêne rouge, murs en craie blanche. Une taverne digne d'un conte de fée!

Sans un regard envers les deux gorilles renfrognés flanqués de chaque côté de la porte, notre jeune arlequine franchit le seuil de la taverne.
Le tavernier, massif bonhomme au ventre proéminent, à la barbe fournie et au sourire édentée riait aux éclats à une plaisanterie d'un homme en armure rutilante. Autour d'eux, d'autres personnes en armures souriaient à la plaisanterie. De l'autre côté du comptoir, la cheminée était en train d'être allumé par une jeune tête blonde souriante. Près de lui un gringalet était en train d'accorder sa harpe, d'où les notes de musique qui filtraient par les fenêtres. Entre les deux murs, une dizaine de tables rondes remplissaient la salle, plus ou mois occupées.

Le tarvenier, Fech, se retourna vers la nouvelle venue, les larmes aux yeux. Il prit un des verres sales qui trainaient sur le comptoir, le passa sous l'eau et avec un chiffon (propre!) commença à l'essuyer. Il s'adressa alors à l'elfe qui s'était rapproché du comptoir:

"-Et voila la plus beauté, notre mystère elfe cagoulée au nom imprononçable! Vous venez démontrez vos talents?"

Fech s'exprimait dans un elfique approximatif mais compréhensible. Les humains ne peuvent décement pas comprendre les subtilités de l'Agile Langage. Mais cet homme possédait un bon fond et était très direct, qualité rare de nos jours!

d4 Messages : 7 Date d'inscription : 19/07/2012

Ha Fech, incorrigible flatteur dois je encore
Et ce jusqu´à l´aurore, prononcer vers risibles
Pour voir la joie éclore dans ton auberge loisible ?

Moi qui berçais l´idée qu´au cours des nuits passées
J´avais à tous prouvé ma supériorité
Tes paroles m´ont blessée, et mon cœur a saigné.

Soit, pour toi je jouerai une belle et triste histoire
Mais, pour une fois ce soir, un complice il faudrait
Ainsi je conterai dans les règles de l´art

Tinuvielle s´intéressa ensuite aux autres buveurs. Leurs armures dénotaient dans cet établissement, et pourtant Fech riait et discutait avec eux comme s´il les connaissaient depuis longtemps. Peut être d´anciens amis venus lui rendre visite. En tout cas ils ne ressemblaient pas aux soudards qui composent habituellement la garde.

Et qui sont ces seigneurs aux belles armures dorées
Des amis éplorés venus chauffer ton cœur
Ou des clients rieurs venus se restaurer ?

A quelques pas de là, le jeune barde avait fini d´accorder sa harpe et commençait à jouer un air guilleret et discret. Les supposés chevaliers étaient grands, massifs, leurs armures renforçant leur carrure, aussi Tinuvielle devait elle lever la tête pour voir leur visage. Pour se mettre à leur hauteur, elle s´assit sur le comptoir.

Admin Messages : 35 Date d'inscription : 05/10/2011

Fech sourit béatement en écoutant l'elfe. Il semblait ne pas comprendre beaucoup de chose mais la mélodie de la voix de Tinuvielle le faisait rêver.
Le plus grand des chevaliers, celui avec qui le tenancier semblait si bien s'entendre, posa son regard sur l'arlequine alors qu'elle égrainait ses vers. Doté d'une carrure monstrueuse, près de 2 mètres de haut pour une bonne centaine de kilos de muscles, ce géant aux yeux aussi dorés que ses cheveux écouta nonchalamment la nouvelle venue. Les trois chevaliers accompagnant le géant semblaient le considérer comme leur chef et lui vouaient une sorte de culte qui mettait quelque peu mal a l'aise Tinuvielle.
Mais en y pensant un peu plus, c'était le personnage en entier qui dégageait une aura particulière, quelque chose comme de la sagesse et une autorité quasi divine. De plus, le chevalier avait quelque chose... d'aérien.

Alors qu'elle avait posé sa question, le chevalier prit la parole. Tout le monde se tut, même le feu qui commençait à crépiter se fit moins virulent. Sa voix, claire et profonde, était posée:

"-Bonsoir ma Dame. Je suis le Chevalier Meraxes, et voilà mes fidèles compagnons, Khay, Ursh et Reiah. Nous sommes ici sur ordre de la Reine pour une mission des plus spéciales. Mais cela peut attendre demain matin. Il est toujours bon, après une longue semaine de chevauchée de venir reposer ses membres fourbus au coin d'un feu bien entretenu par un bon ami, dit-il en faisant un clin d’œil à Fech. Je sais que vous comprenez ce que je vous dis, comme vous savez que je comprend l'elfique. Toutefois je ne me risquerai point à me lancer dans des exercices d'agilité labiale, domaine où vous semblez exceller!
Votre présence en ces lieux semble être appréciée par notre ami commun, venez donc partager notre chère. Il y a, au premier étage, une table qui a été dressé spécialement pour nous. Je pense que Fech ne verra point d'inconvénients à ce que vous soupiez avec nous. Il faudra toutefois que vous continuiez vos jeux de mots et autres calembours."

Sans attendre de réponse de la part de l'arlequine, le chevalier se dirigea vers les escaliers en bois massif de l'autre côté de la salle, sa suite l'imitant. Alors que ses compagnons étaient suréquipés, Meraxes ne portait pas d'arme sur lui, il n'avait même pas de dague accroché à la ceinture! Il ne portait que son armure lourde et un long froc bordeaux qui flottait autour de ses jambes.

d4 Messages : 7 Date d'inscription : 19/07/2012

Tinuvielle les suivit du regard, s´attardant sur leurs armures, leur aspect et leur étrange leader. Lorsqu´ils furent hors de vue, cachés par la rambarde du haut escalier, elle descendit de son perchoir et s´adossa au comptoir. Ces personnages étaient bien mystérieux, surtout celui avec les yeux dorés.

Et il allait sans arme, serein qui plus est
Ses beaux yeux dorés augmentent encore son charme
Vierge j´en aurai versé d´amour presque une larme
Mais sans une guisarme, il ne fait que m´intriguer.

Sa proposition était tentante, ne serait ce que pour savoir d´où ils venaient et où ils allaient. Et cela lui ferait du bien de souper en galante compagnie. Mais une promesse est une promesse, aussi prit elle Fech avec un gracieux mouvement de la main et ondoya à travers les clients pour y trouver son partenaire.

Cet étrange Asimaar aurait put faire l´affaire
On dit que ces planaires s´y entendent bien en art

Mais elle n´allait pas le déranger maintenant, aussi jeta elle son dévolu sur un jeune homme fort élégant. En attendant la fin du spectacle du barde, elle lui expliqua rapidement ce qu´elle attendait de lui. A la vue de son sourire, il n´avait rien compris mais la suivi néanmoins lorsqu´elle le prit par la main et l´entraîna sur scène. Il perdit un peu de contenance et voulut s´éclipser mais l´arlequine le ramena et le fit se tenir au milieu de l´estrade.

Laissez moi vous conter une belle et triste histoire
Coincé dans un miroir, était un prisonnier
Jeune et beau à voir, il contemplait à jamais
Celle qu´il chérissait et qui venait chaque soir.

Ces deux êtres s´aimaient au delà de la raison
Mais au cours des saisons un doute vint à pointer
Elle n´est pas seule dans la maison à partager
Avec lui nuitées et autres combinaisons

« Explique-toi » tonna t´elle « ou bien tu me perdras »
Il la prit dans ses bras « Tu es mon unique belle »
« Rien ne nous séparera, je te suis fidèle »
La nuit les ensorcelle, ils roulèrent sur les draps

Mais ce qu´elle ignorait c´est qu´une sombre sorcière
Tendait une souricière aux amants envoûtés
Car elle aussi naguère le jeune homme convoitait
Et depuis le forçait de commettre l´adultère

C´était un artifice mais la belle ignorante
Ne su tolérer l´amante et pour justice
Pria les hiérophantes de punir cette malice
Le verdict de ce vice ? Une mort suffocante

Devant cette sentence, la belle se rétracta
Mais la sorcière éjecta cette douce repentance
Et à la place opta une double pénitence
Elle tenait sa vengeance, fin de la vendetta.

Pour accéder au souhait d´une peine partagée
L´amant fut enfermé dans un miroir scellé
La belle transformée en une lumière dorée
A jamais reflétée, pour toujours séparés.

Tout le long de la ballade, Tinuvielle joua tour à tour le rôle le rôle de la belle, de l´amante et de la sorcière, câlinant son compagnon, l´envoyant valser à l´autre extrémité de la scène où il se recevait maladroitement. La déclamation prenait du temps, et s´accompagnait de beaucoup de danses, aussi le jeune homme se retrouva vite en sueur, à un point tel qu´il se sentît mal et dû se reposer un moment. L´arlequine termina donc seule, salua son public, quitta l´estrade et se dirigea vers l´étage supérieur ou l´attendait une autre soirée.

Richement décoré, le palier donnait sur plusieurs pièces destinées á recevoir des hôtes de marques ou cherchant un peu de tranquillité. Elle n´eut pas de mal à repérer celle ou se trouvaient les quatre chevaliers, aussi poussa t elle la porte entrebâillée et entra.

Admin Messages : 35 Date d'inscription : 05/10/2011

Tinuvielle pénétra dans ce qui avait tout l'air d'être un salon. Un gigantesque lustre éclairait d'une lumière dorée une salle rectangulaire de dimensions respectueuses. Sur les murs boisés polis par le temps se trouvaient des peintures, des cartes de la région et de ses alentours. En face de l'efle, deux petites fenêtres laissaient filtrer l'air frais de la nuit. Il y avait aussi une autre porte sur le mur de droite, qui permettait sans doute d'accéder à un boudoir ou à une chambre. Au centre du salon trônait une table ronde qui croulait sous les mets qu'avaient préparé le tavernier. Autour se tenaient les quatre chevaliers. Meraxes parlait de sa voix profonde. Son ton avait changé, il semblait plus froid, et expliquait son plan tel un tacticien:

"-... Ainsi nous arriverons à destination dans moins de deux jours. Le temps jouant contre nous, la Reine compte sur nous pour endiguer la menace rapidement et permettre aux messagers de prévenir les Ducs. J'ai prévu que l'on fasse aussi un arrêt à ..."

S'approchant doucement, Tinuvielle attendit qu'on la remarque, laissant trainer ses oreilles sur la mission des chevaliers. Lorsque Meraxes la remarqua, il s'interrompit et les chevaliers braquèrent leurs regards sur l'elfe. Ils se levèrent courtoisement et le Chevalier reprit la parole:

"-Vous voilà ma Dame. Venez, approchez et installez vous. Il montra de sa main une chaise près de la table, qu'un de ses guerriers s'empressa de tirer galamment. Nous allons jouer à un jeu. A chaque ballade que vous chanterez pour nous, nous vous raconterons une de nos histoires ou anecdotes. Comme vous devez être quelque peu exténuée par vos prestations pour Fech, nous commençons."

Lorsque Tinuvielle s'installa, elle examina plus attentivement les mets sur la table. Composé principalement de fruits et de céréales, la table ne soutenait que peu de viandes. Il semblait que Meraxes suivait un régime d'elfe et que ses guerriers non. Dans les cruches se trouvait hydromel vin et bière. L'arlequine leva les yeux lorsqu'elle entendit une chaise racler sur le sol. Le guerrier dénommé Khay se levait et prit la parole sur un sourire de Meraxes. Sa voix, sombre et profonde, s'accordait avec la noirceur étoilée de ses yeux, sa barbe bouclante et ses cheveux noir de jais:

"-Ma dame, je vais vous conter mon histoire. L'histoire de Khay, seigneur de Nal.

Cela fait moins d'une année que je ne porte plus ce titre, et cette histoire vous fera comprendre pourquoi. Je doute que vous la connaissiez, fit-il adressant un clin d’œil à l'elfe.
Connaissez vous le Norska? Ce froid pays d'hiver, peuplé de géants et autres mammouths? Hé bien j'en suis originaire. J'ai passé beaucoup de temps avec deux de mes compagnons de l'époque, Neff et Yugs, à parcourir les plateaux glacés du Norska. Neff était du genre à prendre par surprise nos ennemis avec des pièges et autres poisons alors que Yugs préférait la lourdeur d'une épée à deux mains. Nous formions un joli trio, la dague l'épée lourde et le bouclier.
Une nuit, il y a de cela une dizaine d'année, Yugs disparu. Après deux jours de vaines recherches nous l'avons retrouvé au bord de la mort, tout le corps lacéré. Malgré nos soins acharnés, il semblait voué à la mort...

Pourtant au bout de trois jours de convalescence il s'éveilla sans aucunes séquelles. Nous étions tellement heureux que nous ne nous posâmes pas de questions. Comment avait-il pu récupérer si vite? Comment avait-il fait pour se retrouver dans cet état, lui qui d'habitude est d'une vigilance extrême?

Yugs devint distant et de plus en plus taciturne. Nous projetâmes alors, pour tenter de rendre le sourire à Yugs, de revenir chez nous afin de faire profiter à nos frères nos aventures. Sur la route nous rencontrâmes une prêtresse dénommée Vénus dont je tomba éperdument amoureux...

Vénus était en détresse, un chevalier noir avait détruit tout un village et avait tué ses parents, les seigneurs du château de Nal. Je lui proposer mon bras afin d'assouvir sa vengeance et elle accepta.

Ce fut un rude chemin pour enfin arriver face à ce meurtrier, mais nous y parvînmes...

La nuit était claire, la pleine lune allait se lever. Déboulant dans la salle des doléances, la salle du trône, nous rencontrâmes ce chevalier noir, Kaelish. Son crâne d'un blanc laiteux laissait voir deux orbites creusées et remplis de haine à notre égard. Un âpre combat s'engagea entre lui et nous...

Alors que nous étions sur le point de vaincre Kaelish, j'entendis un hurlement inhumain. En me retournant je vis Yugs prit de convulsions, de l'écume à la bouche. Il s'arrachait la peau... Ses oreilles s'agrandirent, son visage s'allongea et ses ongles poussèrent... Nous comprimes alors... Un loup garou. Il s'était fait avoir par une bande de loup et malgré sa vigueur il trompa la mort en acceptant cette malédiction.

Nous nous retrouvâmes face à deux monstres sanguinaires et nous étions à bout de souffle. Yugs projeta Vénus contre un pilier alors que Neff planta sa dague dans l’œil de Kaelish qui se désagrégea. Je pris l'initiative de donner un grand coup de pavois sur le museau du loup qui s'enfuit en passant par la fenêtre...

Ce fut la dernière fois que je vis Yugs.

Vénus n'avait pas été mordu et ce fut un soulagement. Alors que je décidai de rester avec Vénus à l'aider à reconstruire son domaine, Neff repartit sur les routes.

C'est ainsi que mon groupe se dissolva dans les méandres du temps. Vénus s’éprit de moi et au bout de deux ans nous nous marièrent...

Mais la vie ne pouvait pas être belle si longtemps.

Il y a maintenant un an, nous entendîmes des rumeurs... Un chevalier noir était réapparu... Il ne lui restait qu'un œil et voulait détruire Nal... Je mis au point un fantastique système de défense mais cela fut vain. Kaelish et son armée de non mort nous submergea, réduisant Nal à l'état de ruine. Il sacrifia au Dieu ma bien aimée et me laisse pleurer son cadavre...

Alors que je me laissai dépérir, Meraxes vint à mon secours et me redonna gout à la vie... Toutefois ma vengeance n'est toujours pas assouvie et je sais qu'un jour je reviendrai sur la terre de mes ancêtres pour venger mon aimée, ma mie... ma Vénus."

La voix de Khay s'éteint dans un murmure. Il s'était exprimé de façon claire dans le langage commun. Il semblait à Tinuvielle qu'il revivait son récit en même temps qu'il le racontait et cela ne faisait que le rendre encore plus vivant. L'arlequine avait fini de se restaurer lorsque que Khay se rassit, laissant dans l'ambiance comme un flottement.

d4 Messages : 7 Date d'inscription : 19/07/2012

Meraxes ce jeu me plaît, et je le connais
Jadis dans ma cité, à chaque Lune levée
Un concours se tenait, et plusieurs jours durait
Je n´ai jamais gagné, mais j´était appréciée

Chants, danse et poésie étaient au rendez vous
Songez, le pouvez-vous ? Des elfes de tous pays
Portés par les étésies arrivant chez vous
Parlant avec vous de leurs rêves et de leur vie

Je connais le Norska mais n´y suis pas allée
C´est une froide contrée disait mon ami skaa
Peuplée d´êtres délicats et de puissants guerriers
Glacial rude gelé, tel est pour moi le Norska

Tinuvielle se leva, ondula le long de la table pour finalement s´arrêter à quelques pas du chevalier Khay, pris un pomme de la corbeille et la lui offrit. Elle se tourna ensuite vers Meraxes.

Pour le moment pourtant je me vois au regret
De devoir vous annoncer qu´en si peu de temps
Rien de bien important sur moi je ne dirai
Je conserve mes secrets, vous devriez faire autant.

Elle se saisit alors de cinq autres pommes et jongla un moment avec. Les balles prenaient vie dans ses mains puis elle les envoya brusquement vers les chevaliers, une chacun. Khay fut surpris et la reçu dans la joue. Ursh tenta de l´attraper mais son armure gêna son mouvement et elle le percuta au cou. Reiha, en train de boire une rasade, ne la vit pas venir et fut éclaboussé par le liquide ambré. Meraxes l´intercepta au vol tandis que l´elfette croquait dans la cinquième pomme.

Cependant chevalier, je ne suis pas trompée
Ce n´est pas pour jouer que vous m´avez invitée
Et malgré mes attraits permettez-moi de douter
Qu´avec moi vous souhaitiez passer une nuitée.

Tout en disant cela, elle se dirigea vers la fenêtre ouverte, ignorant les regards énervés ou surpris des chevaliers, et jeta un coup d´œil dans la rue en contrebas ainsi que son trognon de pomme. Elle ferma ensuite les vantaux pour se tourner vers les quatre humains. Leurs armures scintillaient à la lueur mouvante des bougies et du feu, et ils étaient tous d´impressionnante stature. Il n´avaient rien de la grâce et de l´élégance des hommes de son peuple, mais elle avait appris à composer avec cet aspect brut et bestial qui caractérise les humains. En revanche, l´aspect de Meraxes continuait à l´intriguer. Jamais elle n´avait vu un humain pareil, et son aspect physique lui faisait penser à ces histoires se déroulant dans d´autres réalités, avec des princes au coeur pur sauvant des demoiselles en détresse.

Si ce n´est la chair ni les mots pourquoi suis je ici ?
Vous parliez stratégie ou de voyage plutôt
Si de vos idéaux, le secret fait partie
Changez donc de vie vous n´êtes plus incognito.

Je devine sans peine que vous êtes tous chargés
D´une mission pour la reine, vous l´avez dévoilé.
Je vous l´ai dit sans haine et je veux vous aider
Je serais plus sereine une fois bien défoulée.

Admin Messages : 35 Date d'inscription : 05/10/2011

Meraxes regarda la pomme, la jetta en l'air et la receptionna. Il éclata de rire en voyant les expressions de ses compagnons et se tourna vers celle qui était à l'origine de tout ce cirque:

"-Vous ne perdez pas de temps en vaine simagrées. J'apprécie vos manières directes et enjouées, et je pense que mes compagnons les apprécieront aussi, pour peu qu'ils s'y habituent. Je ne sais si vous nous serez d'une quelconque utilité, et bien que nous ne travaillons pas dans le secret cette mission est confidentielle. Toutefois, si vous savez garder votre langue et acceptez de servir sous mes ordres, je vous informerai de la teneur de cette mission royale. Il marqua une pause, en attendant que que l'elfe accepte, ce qu'elle fit d'un hochement de tête. Bien alors commençons le briefing voulez-vous.

Que savez-vous des duchés frontaliers? Surement beaucoup de choses, mais laissez moi remettre les choses au clair, cela ne fera de mal à personne. Ce jeune royaume a été créé il y a plus de cinq siècles par une coalition de marchands. En effet la position centrale du territoire permet un commerce aisé avec toutes les contrées du monde. Et malgré la présence du Vieux Monde et de ses hordes de démons au delà des hautes montagnes de l'Est, ce territoire est sain. Il y a de cela 200ans, une guerre a éclaté entre les marchands. Il s'en suivit une période assez sombre où les hommes montrèrent leur capacité à faire le mal. Un des marchands eu l'idée alors de déplacer les pouvoirs exécutif et législatif dans la main d'un seul être et de laisser le pouvoir judiciaire dans les mains de chacun des rois commerçants. C'est ainsi que naquit la royauté aux Duchés frontaliers, un Roi gouvernant 7 Ducs libres d'appliquer la justice de leur choix sur leurs terres.

Revenons-en à notre frontière, car c'est bien ce qui nous intéresse ici. Depuis 500 ans, aucun démon n'est jamais apparut dans le royaume. De même, depuis 500 ans aucun des aventuriers partit au-delà des montagnes n'est revenu vivant. Toutefois les légendes font mention d'un col qui traverse les montagnes et permet d'arriver dans le Vieux Monde.

Il y a quelques semaines, des démons sont apparus de notre côté des montagnes. Les ducs de l'Est se sont rapidement organisés en Coalition afin d'endiguer cette menace, mais les démons sont forts, et ce même affaiblis par la traversée des montagnes.

J'ai été mandaté par la Reine afin de superviser la gestion de la Coalition avant que tous les Ducs soient au courant. Car pour l'instant aucun bruit n'a filtré, la Reine préfère taire l'apparition de démons sur son territoire tant que ses Ducs n'ont pas été informés par messagers royaux.

De plus, je dois enquêter sur ce fameux col, et si l'aventure n'est pas trop périlleuse, passer de l'autre côté des montagnes afin de réaliser un rapport complet de la situation à la Reine.

C'est ce que j'expliquais à l'instant à mes compagnons. Nous sommes à deux journées de chevauchée du camp de base de la Coalition. Une fois la-bas nous aviserons de la marche à suivre."

Meraxes marqua une pause, probablement afin de permettre à Tinuvielle d'absorber la masse d'informations et de prendre conscience de la tâche à accomplir. Il reprit d'une voix plus douce et avec un sourire:

"-Voila ma Dame, vous savez tout. J’espère que vos muscles sont assez déliés pour vous permettre de vous défouler face à un démon du Vieux Monde. Il m'est déjà arriver d'en affronter, et croyez-moi, ils sont assez coriaces. Des questions?"

[HRP: Je ne me souviens plus du nom du col, mais vous en avez suivi le chemin lorsque Lia s'est lié à son 2e Vestige.]

d4 Messages : 7 Date d'inscription : 19/07/2012

Des démons, ces créatures surnaturelles issues des rêves, de la psyché et du désir des êtres vivants, projection matérielle de la nature du monde. Et ce monde est laid, mieux vaut en rire qu´en pleurer.
Doués d´une force colossale, insensibles aux armes normales, ces entités abominables sont un danger constant pour toute personne douée de raison. Seules les dissensions permanentes de leurs maîtres et les guerres qu´ils se livrent fournissent un répit aux mortels.

Qui aurait pu croire qu´en cette taverne bancale
Je trouverai ce soir un fringant général
Et ses faire-valoir partis combattre le mal
Pour raviver l´espoir sur les frontières royales

Et je me retrouve là, faible créature
Entourée d´échalas vêtus de lourdes armures
Me proposant comme ca d´aller à l´aventure
Dans des lieux où le froid vous brise les jointures

Je ne suis pas diplomate, une elfe qui plus est
Je manque d´un certain tact, je ne sais que danser
Je n´aurai pas l´impact d´un guerrier entraîné
Mais scellons ce pacte, cette histoire j´avoue me plaît

L´arlequine quitta le rebord de la fenêtre pour revenir au centre de la pièce, près du feu ronflant dans la cheminée. Son regard se perdit quelques secondes dans les flammes. La lueur du foyer jouait avec son costume bariolé, et les filigranes de son masque luisaient d´une clarté ambrée. Le mouvement des flammèches lui rappelait celui de ses anciens compagnons, rapide, imprévisible et agile. Elle revoyait la danse, la chorégraphie de la Chute, le métal perçant la chair et la longue épée couverte de sang. Une bûche s´écroula, faisant valser les étincelles et ses pensées en éclats. Elle leva la tête et se rendit compte que tous les regards étaient braqués sur elle.

Je ne cherche nul profit, ni titre ni noblesse
Je me vois mal bailli, et encore moins duchesse
Ainsi mes doux amis, pour que je vous connaisse
Vous me conterez vos vies enchanteresses

Pendant ce court voyage vers les montagnes gelées
Selon le paysage je vous déclamerai
Poésies et adages du petit peuple fée
Et si vous êtes sages mon histoire je narrerai

Je vous attendrai, aux premières lueurs du jour
A la porte d´entrée de ce lieu de séjour
Oui en moi vous avez trouvé un troubadour
Mais il faudra me porter tout votre secours

Tinuvielle tira sa révérence sans attendre de réponse. Au moment de franchir la porte cependant, elle jeta un dernier coup d´œil dans la pièce. Tous la regardaient, Khay commençait à se lever et Ursh avait l´air de vouloir parler. Elle se glissa dans le couloir et se dirigea vers sa chambre, un étage au dessus. Le lit n´avait pas été touché depuis son arrivé. Sur la chaise pendait son baudrier et son épée, une fine lame elfique qui s´avérait être son seul vrai compagnon ces derniers temps. Et pourtant même toi tu m´as trahie. Elle se laissa tomber sur le matelas de plumes, ôta son masque et commença à se préparer pour se laver.

L´arlequine repensa à sa soirée, à ce pauvre homme qu´elle avait à moitié tué d´épuisement, à Meraxes, Khay, Ursh et Reiah et à leur mission royale. Elle déboucla sa ceinture et ôta le haut de son costume. Même dans la pénombre, il arrivait à briller. Des reflets argentés se mêlaient aux motifs fuligines, sans cesse changeants comme la surface de l´eau. Avec son arme c´était la seule chose qu´elle possédait, ca, sa solitude et ses regrets. Je devrais y être habituée puisque j´y suis destinée.

Pourtant, à chaque fois qu´on lui proposait de voyager, son cœur battait la chamade, ses pensés s´égaraient et son esprit vagabondait. Plus que tout, elle aspirait à de la compagnie, retrouver le plaisir de jouer en groupe, de raconter des histoires et d´incarner de puissants héros. Mais cette nuit, une fois de plus, elle se retrouvait sans partenaires ni public, face à son miroir, et comme le sommeil vient difficilement aux elfes, elle entama sa danse, la danse du Solitaire.

De par leur nature, les arlequins du Dieu Moqueur vivent en marge de la société elfique, visitant les enclaves de tous les pays, tissant des liens avec chaque type d'elfe quelque soit leur nature, leur allégeance ou leur conflits interraciaux. Cependant, même parmi les arlequins les Solitaires sont perçus comme des êtres maudits, condamnés à interpréter le rôle de celui qui causa la chute des elfes. En temps de paix, ils sont tenus de donner le rôle et la répartie au chef de troupe, brillant acteur représentant la race elfique, mimant sur scène les combats épiques d'avant la venue des hommes. En temps de guerre, les solitaires forment des troupes d'assaut d'élite, agiles et meurtrières, confondant représentation théâtrale et champ de bataille. Leur rôle leur impose une souplesse sans égale, une habileté aux armes à nulle autre pareille, et c'est pourquoi la Danse existe.

Tinuvielle se laissa porter par les mouvements, enchainant saut, cabrioles et acrobaties à un rythme de plus en plus soutenu. Chaque geste en amenait un autre, une chorégraphie fluide et bondissante faite pour le spectacle et le combat. Elle atteignait le point culminant de sa représentation lorsqu'un douloureux épisode lui revint en mémoire. La honte, la peine et le chagrin liés à ce souvenir la figèrent sur place et l'espace d'un instant, elle manqua trébucher. Sortie de sa transe, elle fut envahie par le remord et la tristesse et préféra chercher refuge dans le sommeil.

Pourquoi ce mauvais pas ? Et à ce moment là ?
Est ce lui qui dérapa ou ma faute à moi ?

Cette pensée la tint éveillée jusqu'au petit matin

Admin Messages : 35 Date d'inscription : 05/10/2011

Des bruits de pas. Une personne de stature imposante s'approche de sa porte et frappe.

"-Ma Dame? Etes vous levée? Nous vous attendons en bas."

Les bruits de pas repartirent dans l'autre sens, leur intensité diminuant. Tinuvielle sortit de sa transe. Elle ne savait pas quand elle y avait succombé mais elle pu finalement se reposer un peu cette nuit. En jetant un coup d’œil par la fenêtre, l'elfe remarqua que le soleil n'était même pas levé. Seule une infime partie du ciel était colorée d'un rose bleuté. S'équipant, l'arlequine sortit de sa chambre, sans un regard en arrière.

En descendant l'escalier, Tinuvielle vit les quatres chevaliers en train de vérifier leurs paquetages et de les sortir vers les écuries. Meraxes leva les yeux vers la nouvelle venue et s'exprima:

"-Bonjour Dame Tinuvielle. J'espere que votre nuit a été bonne car nous avons une longue journée de chevauchée qui nous attend. J'ai pris l'initiative de vous acheter un cheval, Fech en a de très bon. Elle s'appelle Eladia et j'espère que vous vous entendrez bien. Si vous voulez déjeuner, notre bon tenancier nous a préparé de quoi nous restaurer pour le voyage. Il a pensé à votre régime alimentaire il me semble. Je finis de seller mon cheval, retrouvez-nous aux écuries."

Tinuvielle se restaura rapidement et se retrouva dans les écuries où elle trouva le grand chevalier blond en train de donner le plan de route:

"-Nous chevaucherons toute la journée. J'espère pouvoir couvrir une assez grande distance afin que nous nous arretions chez un bon ami à moi pour la nuit. Puisse-t-il toujours être vivant, cela fait longtemps que je n'entends plus parler de lui et de ses méfaits. Vous le rencontrerez bien assez tôt, dit-il en souriant. Je repondrais à vos questions en chemin. Allez! En route!"

Sur ce, il grimpa sur son puissant étalon dun et le talonna alors que le soleil apparaissait au dessus de l'enceinte de la ville.

d4 Messages : 7 Date d'inscription : 19/07/2012

Toute....toute la journée ?? N'est ce pas exagéré ?
Partir à l'aventure sur de bien belles montures
J'avoue, cela me plaît mais sans nous reposer
Ce sera une torture pour ma frêle ossature

Voyant que personne ne lui prêtait attention et que le seul parlant sa langue était déjà loin, elle se résigna et entra dans l'écurie ou l'attendait comme promis une jument de robe pie. Tinuvielle s'en approcha doucement et avec une certaine méfiance. Elle n'avait pas du tout l'habitude des chevaux, ses pérégrinations l'ayant menée des profonds bois sacrés des elfes sylvains aux cités lumineuses des hauts elfes, en passant par les glaciales et torturées forteresses des elfes noirs. On y croisait de nombreux animaux étranges mais très peu de chevaux.

La jument devait avoir senti le mal être de l'elfette car elle renâcla et lâcha un léger hennissement. Elle fixait cette petite créature d'un regard curieux et méfiant. Apparemment, elle n'était pas habituée aux elfes.

Ohlala, cette bête est beaucoup trop grande pour moi
Regardez, je ne lui arrive pas au garrot
Encore heureux qu'elle soit déjà sellée sans quoi
Je n'aurais même pas pu aller au petit trot

Tinuvielle surmonta sa peur et s'approcha d'un pas en direction du cheval. Ce dernier resta calme, ce qui incita l'elfette à s'approcher un peu plus. Lorsqu'elle fut assez près pour pouvoir le toucher, la jument poussa un grand hennissement. Sous l'effet de la surprise et de la peur, Tinuvielle tomba à la renverse sur le sol boueux de l'écurie. En cette heure matinale, aucun valet n'était levé, personne ne pouvait l'aider. Boueuse, trempée et terrifiée, Tinuvielle ne savait vraiment pas quoi faire.

Pourquoi est ce si ardu? Dans les contes des fées
Jamais on a vu héros ainsi humilié
Par une bête stupide bonne à manger l'herbe
Sois disant rapide, au caractère acerbe

Vraiment quelle créature ô combien macabre
Une telle encolure invite la caresse du sabre
Une si fine fourrure qu'on pourrait la croire glabre
La Mort, sombre augure, l'a préférée au zabre

Alors que l'elfette passait sa colère à coup d'alexandrins et de tentatives ridicules d'approcher du cheval, Khay, soucieux de ne pas la voir les suivre, entra dans l'écurie et tomba sur le cocasse spectacle. Un grand sourire aux lèvres, il calma et la jument et l'arlequine et aida cette dernière à enfourcher sa monture.

Je resterai à vos côtés pendant la chevauchée si cela peut vous rassurer. Maintenant hâtons nous, nous n'avons que trop tarder.

Par Loëht, c'est encore pire quand on est dessus
Et quel inconfort, parlez moi d'une souche moussue
Ou d'un bon fauteuil de cuir rembourré et de cuir cousu
Avant la fin du jour, je finirai bossue.

Au bout de trente minutes, elle avait épuisé tout son récital d'injures sur les chevaux, au bout d'une heure, elle en avait créé suffisament pour ne plus jamais être à court d'insultes. Deux heures de chevauchée lui apprirent les affres de la monte. Après trois heures de voyages, elle avait tellement mal qu'elle ne trouvait plus la force de parler ni de répondre aux moqueries des chevaliers. Le galop lui était impossible. Ils avaient essayé une fois mais elle était tombée de sa monture, et depuis l'allure de trajet était un trot soutenu. Meraxes rongeait son impatience, mais l'incompétence de Tinuvielle apportait une franche bonne humeur parmi ses compagnons, et elle ne lui posa aucune question.

Admin Messages : 35 Date d'inscription : 05/10/2011

Et c'est ainsi que débuta le périple de Tinuvielle. Pestant contre son cheval et les désagréments des voyages équestres, la jeune elfe ne prêtait guère d'attention au paysage qui défilait autour d'elle.

Alors que le soleil se levait et dispensait sa chaleur, la troupe traversait un région agricole. Les paysans étaient déjà aux champs. Menant leurs bêtes, ils bêchaient la terre et plantaient les derniers légumes qui allaient pousser avant l'hiver: salade, choux-raves, radis, haricots nains, etc. Cette plaine aux ressources abondantes s'étendait des abords de la ville et continuaient sur des dizaines de kilomètres, et cela faisait la renommée de l’agriculture de Lorcust.

Toutefois, au bout de trois heures de chevauchée, le paysage commença à se vallonner et les arbres, qui étaient jusqu’à présent très rares et rabougris, commençaient à se faire plus présents.

Alors que le soleil avait atteint son apogée, Meraxes proposa de s'arrêter pour se restaurer. Il mit pied à terre près d'un ru et s'y rafraichit. Puis il mit en garde ses compagnons:

"-Nous arrivons dans une région où l'autorité du Duc est quelque peu mise à mal. Des brigands ce sont associés à une bande de gnolls et ils terrorisent les voyageurs. Espérons ne pas tomber dessus, dit-il avec un grand sourire."

Après une pause qui parut trop court au gout de l'arlequine, ils reprirent la route. Le soleil continuait sa course vers l'ouest et les hautes montagnes se rapprochaient. Vers le milieu de l'après-midi ils atteignirent un carrefour au sommet d'une colline. Un chemin continuait vers l'est mais Meraxes les conduisit vers l'autre qui cheminait vers le nord-est, en direction d'une forêt qui s'étalait au loin.

"-C'est dans cette forêt que mon ami habite, il nous faut le trouver. Je n'ai guère de souvenir de cet endroit étant donné sa tendance à la paranoïa. Faites attention où vous marchez, garder les yeux ouverts et votre ouïe affutée, il ne serait pas bon de tomber dans un piège qu'il aurait tendu à l'attention de ses ennemis..."

Alors qu'ils approchaient de l'orée de la forêt, des constructions en bois récente apparurent. Trois hommes et deux gnolls sortirent de sous l'ombre des arbres et se campèrent sur le chemin. Ils étaient vêtus d'armure de cuir cloutés et portait à la ceinture des épes courtes de qualité douteuse. Quant aux gnolls, ils bavaient d'écume sur leur hache d'arme. De nombreuses cicatrices étaient visibles dans leur fourrure d'un roux sombre tacheté. Meraxes se retourna vers Tinuvielle et lui dit les yeux rieurs:

"-Voila votre première épreuve gente dame. Il nous faut passer à travers ce barrage, sans débourser un sou et sans effluves de sang. Si vous êtes une vrai troubadour cela ne devrait pas vous poser de problème. Inventez votre propre histoire, nous serons derrière vous pour vous protéger si jamais cela se passe mal."

Et sans attendre une approbation de l'elfe, il la laissa passer devant et continuer au trot vers l'orée de la forêt. Le plus grand des trois brigands les héla alors:

"-Hola gente compagnie! Si vou'v'lez continuer por la c'est 200 pièces d'or par tête! Allonger la monnaie ou j'vais vous saigner", dit-il avec un sourire démoniaque.

d4 Messages : 7 Date d'inscription : 19/07/2012

Perclue de crampes, Tinuvielle mis quelques instants à s'apercevoir qu'on venait de lui parler. Sortant de son apathie, elle regarda autour d'elle, s'aperçut qu'elle ne suivait plus personne et qu'elle était au contraire passée en tête du cortège. De plus, une bande déguenillée d'humains accompagnés de grandes créatures musclées et poilues ressemblant à des loups bipèdes lui barrait la route. Est ce à cause du fait qu'elle ne savait pas du tout comment pareille situation était advenue, de l'allure ridicule de ces incongrus badauds ou tout simplement un craquage nerveux ? En tout cas, c'en fut trop pour l'elfette qui éclata de rire.

Bien sûr ce n'est pas du tout la réaction qu'escomptait le leader des bandits, et il le fit vite savoir.

Qu'est ce qu'y a de drôle ? Si tu aimes tant rigoler, j'peux te faire un second sourire. Descend de ce cheval et allonge l'oseille ou j'te jure que tu te marreras plus jamais.

L'arlequine sauta sur l'occasion de quitter sa monture et mit pied à terre, enfin tomba à terre serait plus exact, sous les quolibets et railleries acerbes des malfrats. Leur chef sembla prendre confiance devant la docilité de l'elfette, mais resta près de ses hommes.

Bien, en voilà une pouliche bien dressée. Maintenant le fric, et magne toi !

Ma foi, allonge le fric, aboule l'oseille
Fait péter l'artiche, temps de raquer le blé
Moi, Tinuvielle, pourrais je faire sourde oreille
Devant une requête tellement endiablée ?

Vous devriez je crois, voyager chez les nains
Qui on fait un jeu de déclamer haut et fort
Tous les noms existants de ce doré venin
Vous vous défendriez à la chanson de l'or

Il va me falloir toutefois protester car
Comme vous le voyez, je suis bien accompagnée
Quatre preux chevaliers, et vous êtes trois tocards
Certes vous avez deux gnolls, mais ce n'est qu'une poignée

Tout en parlant, elle essayait de dénouer ses muscles du mieux qu'elle pouvait, mais c'était peine perdue et elle le comprit rapidement. Aussi arrêta-t-elle ses cabrioles pour se concentrer sur son interlocuteur. Il avait au moins deux têtes de plus qu'elle, et pesait probablement plus de deux fois son poids. Pourtant, il paraissait petit comparé aux créatures qui l'accompagnaient. Les gnolls la regardait avec des yeux sans vie, laissant de temps à autres échapper un petit couinement ou un rire malsain. Elle ne doutait pas de sa capacité à occire trois humains, et les gnolls étaient des créatures stupides, mais heureusement pour eux le voyage de la journée l'avait complètement brisée. Pour une fois, elle avait parlé en commun. Elle était trop lasse pour s'extasier des têtes ahuries des gens quand elle leur parlait, et elle avait besoin de se faire comprendre pour se sortir de cette situation.

Ferme la ! J'pige pas un mot sur deux de c'que tu dis, mais j'crois que tu m'as traité de tocard. Pour sûr, tu vas le regretter, et pas plus tard que maintenant.

Ce disant, il avança à grandes enjambées tout en dégainant son épée. Les gnolls suivirent aussitôt, poussant ce petit gloussement qui caractérise chez eux l'excitation et la joie. Les deux autres bandits leur emboitèrent le pas, et Tinuvielle battit rapidement en retraite.

Oh la oh la calmons nous et réfléchissons
Pas besoin de s'énerver ni de me tuer
Parce que si vous le faites, bande de polissons
Vous subirez le courroux des preux chevaliers

Vous êtes cinq fiers brigands, allant tous à pied
Munis d'épées rouillées, d'armure de cuir tanné
Pensez vous résister à quatre chevaliers
Armurés, bien armé et montés qui plus est ?

Si vous avez des compères ici dans ces fourrés
Certes vous me tuerez mais qu'adviendra t'il après ?
Même s'ils sont par l'honneur liés, nos chevaliers
Fuiront pour plus tard se venger avec des alliés

Pesez donc sagement messire votre décision
M'occire maintenant vous ferait un grand plaisir
Mais je me dois d'ajouter une courte précision
Ce n'est pas aujourd'hui que je me vois mourir